On flotte dans ce monde plongé dans l'obscurité

je ne sais si mon oeil voit ce qu'il voit tant la noirceur aspire mon regard comme un trou noir

Forcée de me concentrer pour peupler mon champ visuel

trouver mes appuis en imaginant des prises dans des interstices 

Effritement des certitudes

je ne vois rien

si peut-être l'ombre de moi-même 

l'oeil lumineux je m'abandonne dans le noir qui m'absorbe lentement

je traverse ce monde guidée par la nuit

le temps se diffuse dans les profondeurs comme une tâche d'encre déployant les surplis de sa robe 

son velours lourd tape le fond et remonte en surface en négatif

Étale, le temps ralentit son débit, étouffe, pause longue

La lenteur du blanc à se révéler peine à faire monter le noir 

L'île noire me rejette, la pleine lune m'aveugle 

Je glisse dans une barque regagner la berge des vivants

Filer dans l'écume du temps souplement 

Je me retourne regarder ce que je ne pourrais plus voir

Derrière moi la matière noire émerge, puissante, lumineuse,

outrenoire.